Cahiers d'études lévinassiennes n° 20

Le nihilisme

23 €

274 pages

Paru le 17 octobre 2024

Carine Brenner et Romain Buin, « Présentation »

LE NIHILISME

Luc Brisson, « Le nihilisme dans la pensée en Grèce antique »

Pierre Caye, « Machiavel tragique. La politique à l’épreuve de l’impuissance et de la mort »

Gilles Hanus, « Visages du rien »

René Lévy, « Nihilisme et révolution »

Patrick Marot, « Littérature, modernité et nihilisme »

Ioulia Podoroga, « La vérité tronquée des nihilistes russes »

Ivan Segré, « Moïse à l’épreuve du nihilisme »

HOMMAGE

Jean-Claude Milner, « Benny Lévy, vingt ans après »

TEXTES

Sergei Netchaïev, « Le catéchisme du révolutionnaire »

RECENSIONS

BIBLIOGRAPHIE

CITATIONS

« L’Empire du rien », telle est l’expression qu’utilise le Maharal de Prague dans La lumière du commandement (Ner Mitzva) pour caractériser le règne du quatrième Empire, expression qui retint l’attention de Benny Lévy dans Le meurtre du Pasteur. L’Empire du rien se donne non seulement comme la seule totalité possible, mais encore comme la totalité ultime : parachèvement du processus de l’histoire universelle, ou plutôt, de l’histoire de l’universel, qui est celle de l’extension planétaire du Grec : Rome, l’Occident, l’Allemagne – bref, la modernité, l’unification du multiple poussée à son maximum.

Comme le souligne Benny Lévy, avec l’avènement de l’Empire du rien, il n’en va pas simplement d’un règne de l’apparence qu’il s’agirait de traverser pour retrouver une vérité enfouie ; il n’en va pas simplement non plus d’un relativisme généralisé, auquel seule la restauration d’une « autorité » pourrait remédier. Ni symptôme historique d’une humanité parvenue au stade de l’épuisement et du désenchantement, ni maladie de la culture parmi d’autres, pas davantage une quelconque défaite de la pensée, le nihilisme est l’attitude morale qui se signale par son indifférence foncière à l’égard de la vérité en tant qu’elle a été anéantie, il est l’indifférence érigée au rang de vérité.

Si le quatrième empire de l’histoire de l’universel marque l’accomplissement de la vérité de l’universel, il ne saurait être rien d’autre qu’un anéantissement, une destruction intégrale, une « dé-consistance » (B. Lévy). La néantisation de la vérité est la vérité de l’universel qui s’est fait histoire, elle est son principe même.

Dès lors, sommes-nous condamnés à gémir indéfiniment sur la dépouille des idoles de l’Occident, en espérant que du mal et de la mort surgira du nouveau, des dieux ou un dernier Dieu ? Ou bien faut-il une fois pour toutes renoncer à la théodicée, mettre entres parenthèses l’histoire de l’universel et faire retour à l’origine pour faire advenir un temps messianique ?

Telles sont les questions que nous voudrions aborder dans cette vingtième livraison des Cahiers d’études lévinassiennes, qui marque aussi les vingt ans de la disparition de Benny Lévy, leur créateur, à qui nous avons tenu à rendre hommage.