Couverture des Cahiers d'études lévinassiennes n°13, L'Etat de César

Cahiers d'études lévinassiennes n° 13

L’État de César

23 €

192 pages

Paru le 8 octobre 2015

Présentation

L’État de César

Luc Brisson, La loi selon Platon et la plupart des philosophes de l’Antiquité.

Gérard Conio, L’empire russe et Moscou, troisième Rome.

Gilles Hanus, Le paradoxe de l’État chez Emmanuel Lévinas.

René Lévy, L’État, l’ambivalence du pouvoir.

Variations

Éric Vuillard, Vie de John Jacob Astor.

Pierre Moyse, Au clair de la mer.

Textes

Franz Rosenzweig, Introduction aux Écrits juifs d’Hermann Cohen (2).

Gilles Hanus, Penser avec un autre (commentaire)

Panorama

Emilio Baccarini, La réception italienne de la pensée d’Emmanuel Lévinas.

Recensions

Bibliographie

Citations

Présentation

L’État constitue la forme la plus accomplie de la rationalité politique. Du moins est-ce toujours ainsi qu’il se présente, comme le lieu d’un possible partage de la raison, fondant la paix et permettant de ce fait de soustraire les relations interindividuelles à la violence naturelle. Lévinas reconnaît partiellement la pertinence de cette description. Sans l’État, « les hommes s’avaleraient les uns les autres tout vivants », écrit-il citant les Pirkei Avoth ; ainsi faut-il prier pour le bien du pouvoir, de l’État, ce qui équivaut apparemment à la reconnaissance de son rôle positif dans la vie des hommes.

Mais dans le même temps, Lévinas, tant dans ses textes philosophiques que dans ses lectures talmudiques, ne cesse d’interroger la rationalité qui constitue le principe de l’Etat. Il décrit par exemple la façon dont la rationalité des lois peut se transformer en raison impersonnelle s’imposant désormais à ceux-là mêmes qui les avaient pourtant voulues. Ce risque toujours présent de la bureaucratie, d’un pouvoir souverain oubliant ce pour quoi il fut institué, d’un État cherchant à déployer sa puissance impériale, Lévinas le pointe dans les lectures talmudiques sous le nom d’« État de César » :

« […] l’État de César, malgré sa participation à l’essence pure de l’État, est aussi le lieu de la corruption par excellence et, peut-être, l’ultime refuge de l’idolâtrie. »1

Le passage du plan politique au plan métaphysique modifie profondément le visage de l’État. Peut-être faut-il penser que la justice qu’il impose contre la force brute n’est pas encore justice véritable ? Peut-être son pouvoir, susceptible de virer en oppression, fait-il en vérité obstacle aux accomplissements véritables ?

C’est précisément cette duplicité de l’État, cette ambiguïté de la rationalité politique que nous avons souhaité interroger dans ce numéro.

1 Emmanuel Lévinas, « L’État de César et l’État de David », L’au-delà du verset, Paris, Minuit, 1982, p. 216.